Le moins que l’on puisse dire, eu égard aux tournures que prend la crise socio-politique actuelle au Mali, est que les masses laborieuses du pays ne savent plus à quel saint se vouer tellement elles sont éprouvées par des difficultés subséquentes à ladite crise. Mais à bien y disserter, on serait porté à se faire encore plus d’appréhension quant aux éventuelles conséquences que pourraient nous réserver les suites de ce mouvement de contestation. Cette appréhension est d’autant légitime quand on sait que la principale exigence du mouvement de contestation est la démission pure et simple du Président IBK, pourtant démocratiquement élu par le peuple souverain du Mali. Est-il vraiment besoin de dire, dans le contexte actuel de la realpolitik, la démission ‘’au forceps’’ d’IBK créerait plus de problèmes qu’elle n’en résolve au Mali ?
La réponse à ce questionnement est évidemment l’affirmative dans la mesure où l’on sait que contraindre à la démission un Président, dont l’élection a été entérinée par toute la communauté internationale, est une forme de coup d’Etat. Aucun pays, aucune organisation internationale ne s’accommodera de travailler avec des autorités installées suite à un putsch, de quelque nature que ce soit. Et d’ailleurs l’ex-Président nigérian, Goodluck Jonathan, qui a conduit la dernière mission de la CEDEAO au Mali, n’a pas manqué de prévenir en ces termes : « Aucune forme de changement non constitutionnel d’accession au pouvoir ne sera acceptée par la CEDEAO. Mais aussi au niveau international, aucun pays ni aucune organisation crédible et sérieuse ne voudra travailler avec des autorités transitoires dans un pays. Lequel qu’il soit ».
Du fait que le Mali soit un pays entièrement enclavé avec un très faible taux d’industrialisation, son économie est en conséquence fortement tributaire de l’importation des produits de premières nécessités. A cet égard, c’est plutôt l’économie de marché qui s’impose pour assurer l’équilibre de l’offre et de la demande. Toute chose qui fait de cette économie de marché une pièce extrêmement importante dans le circuit des recettes nationales du pays. Il serait superfétatoire que dire, une démission au forceps du Président de la République, avec pour conséquence le ralentissement, sinon l’arrêt, des opérations d’import-export exposerait infailliblement notre système économique à des difficultés de divers ordres, si bien que l’équilibre budgétaire dans les ménages s’y trouverait sérieusement affectée.
Il n’est un secret pour personne que la majorité écrasante des citoyens maliens vit au jour le jour avec pour principale préoccupation, la recherche de la pitance.
Il serait alors superflu de dire, l’impact économique d’un quelconque putsch, de quelque nature qu’il soit, sera très défavorable sur la vie des ménages. En tout cas il ne faut surtout pas se leurrer car, de par son enclavement et aussi de par la faiblesse du taux d’industrialisation de leur pays, les Maliens ne pourraient qu’essuyer d’énormes difficultés au plan économique, en cas de changement non constitutionnel à la tête du pouvoir d’Etat. Outre les difficultés économiques que connaitra le Mali en cas de démission au forceps, il y a aussi le risque plus que probable de la fragilisation, sinon de l’abîme, du tissu social. En effet si les pourfendeurs du régime ne jurent que par la démission d’IBK, peu importe pour eux l’interprétation qu’en fera la communauté internationale, il faut aussi dire qu’un autre courant, et pas des moindres, de la société malienne en appelle plutôt à la légalité constitutionnelle et de ce fait, fustige l’exigence de démission.
Ce sont-là deux camps qui se regardent en chiens de faïence et cela contribue à rendre délétère une situation naguère précaire.
Cette querelle larvée pourrait éclater à tout moment et aucun des deux camps n’y gagnerait quelque avantage que ce soit. Mais nous touchons du bois pour qu’on n’en arrive pas à cet extrême. Même au cas où cela se produisait, les conséquences seront dramatiques et sous prétexte de rétablir l’ordre, une troisième force censée être neutre pourrait intervenir et…. La suite s’imagine aisément car c’est un scénario classique connu… Dans le cas d’espèce, aussi bien les contestataires que les partisans du régime, seront tous écartés et le pays ne fera que sombrer davantage. Avec la crise multidimensionnelle que le sort lui impose depuis huit ans maintenant, le Mali n’a vraiment plus de force nécessaire pour supporter une autre espèce de coup d’Etat qui ne ferait qu’en rajouter aux souffrances du peuple. Le M5-RFP doit le comprendre dans ce sens.
El Hadj Mamadou GABA
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