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LUTTE CONTRE LA CORRUPTION

De ‘’gros poissons’’ dans la nasse du pôle économique

Les maliens avaient commencé à déchanter de la lutte contre la corruption et cela pour raison d’une espèce de relâchement qui a été constaté du côté des magistrats du pôle économique et financier, censés conduire cette lutte. Il faut dire que ce désenchantement du peuple est d’autant normal dans la mesure où les autorités maliennes se sont toujours illustrées par des promesses non tenues en matière de lutte contre la corruption.

Signalons que depuis l’avènement de la démocratie multipartite au Mali, tous les Présidents de la République qui se sont succédés au Palais de Koulouba ont brandi la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite comme arme dissuasive, mais sans jamais parvenir à traduire cette menace en actes concrets. C’est eu égard à cette réalité conjuguée avec le semblant de relâchement, que les citoyens maliens se font à l’idée, qu’à l’image des précédentes velléités d’opérations anticorruption, celle lancée sous la houlette du tandem ‘’Malick Coulibaly-Mamadou Kassogué’’ ne produira pas, non plus, les effets escomptés.

Toute chose qui amène les maliens à se convaincre que dans notre pays, c’est tout simplement la quadrature du cercle que de vouloir mener une lutte équitable contre la corruption, d’autant plus que certains dossiers au nombre desquels on peut citer celui de l’achat de l’avion présidentiel, celui de l’achat des équipements militaires et celui des avions cloués au sol, impliqueraient des personnalités dans la haute sphère de l’Etat et qui seraient des ‘’intouchables de la République’’.

Bien que le ministre de la justice, Malick Coulibaly, ait déclaré lors d’une émission télévisée sur l’ORTM que « le dossier des avions cloués au sol n’est pas rangé dans le tiroir, comme la rumeur publique l’annonce. L’opinion sera informée des suites de l’évolution de ce dossier. Aussi le dossier relatif à l’acquisition de l’avion présidentiel et celui se rapportant à l’achat des équipements militaires seront remis au goût du jour», les maliens sont néanmoins restés très dubitatifs quant à la possibilité pour les magistrats anticorruption de toucher à des dossiers aussi sensibles que ceux mentionnés ci-dessus.

Eh bien comme pour rassurer les maliens de sa ferme volonté de mener une lutte équitable contre la corruption, le pôle économique et financier a remis sur la table, les dossiers dits de ‘’l’achat de l’avion présidentiel’’ et de ‘’l’achat de matériels et équipements militaires’’. Pour les besoins d’instruction desdits dossiers, de hautes personnalités appartenant ou ayant appartenu au sérail de la haute hiérarchie de l’Etat, sont concernées.

On pourrait donc dire, de façon métaphorique, que ce sont de ‘’Gros Poissons’’ qui sont dans la nasse du pôle économique et financier. Il s’agit de Soumeylou Boubèye Maïga et de Mme Bouaré Fily Sissoko, respectivement ministre de la Défense et des Anciens Combattants et ministre de l’Economie et des Finances, au moment des faits qui remontent à 2014. Aussi sont concernés Moustapha Ben Barka, Mahamadou Camara et Sidi Mohamed Kagnassi qui exerçaient respectivement les fonctions de : Délégué auprès du ministre de l’Economie et des Finances, chargé de la promotion des investissements et de l’initiative privée ; Directeur de cabinet du Président de la République ; et Conseiller à la Présidence de la République.

Signalons que toutes ces personnalités ont été mises en cause dans le rapport 2014 du Bureau du Vérificateur Général (BVG). Ledit rapport, selon un communiqué du procureur du pôle économique et financier, indique que les concernés sont soupçonnés « des faits de détournements de deniers publics sur fond d’opérations frauduleuses pour un montant de 9 350 120 750F CFA et de surfacturation par faux et usage de faux pour un montant de 29 311 069 068F CFA ».

S’il y a belle lurette que nos deux magistrats ‘’anticorruption’’ ont entrepris de fouiner dans ces dossiers, avec toute la discrétion qui y sied, il faut dire qu’à présent les choses commencent à éclater au grand jour avec l’arrestation et la mise sous mandat de dépôt, depuis le vendredi 27 mars 2020, d’une des personnalités mises en cause, en l’occurrence Mahamadou Camara, l’ex-directeur de cabinet du Président de la République et non moins ex-ministre de la Communication.

Avec la reprise en main de ces dossiers, par le pôle économique et financier, l’espoir d’une lutte égalitaire contre la corruption renait chez les citoyens même s’ils ne sont pas dupes que le combat que mène le tandem ‘’Malick Coulibaly-Mamadou Kassogué’’ sera parsemé d’embûches. En effet, à bien disserter sur certaines dispositions légales et aussi sur certaines procédures judiciaires en vigueur dans notre pays, on serait porté à se faire des appréhensions tout à fait légitimes à propos de certains écueils qui pourraient s’avérer très handicapants pour l’acheminement de la lutte contre la corruption. Au nombre desdits sujets handicapants, il y a l’immunité parlementaire dont bénéficient les députés et l’institution de la Haute Cour de Justice.

Il ne se fait l’ombre d’aucun doute que ces dispositions légales de la République pourraient constituer de sérieuses sources de difficultés pour mener à bien la lutte anticorruption. En effet, au regard de ces dispositions légales de la République, non seulement certains ministres en fonction pourraient bien échapper à la machine répressive de l’anticorruption mais aussi certains députés pourraient se mettre sous le parapluie de l’immunité parlementaire.

C’est donc à juste raison que le citoyen ‘’lambda’’ malien se demande si, face à de telles éventualités, le juge anticorruption et son ministre auront-ils les moyens légaux pour exercer leurs fonctions comme ils l’auraient souhaité ?

En tout cas, ils sont parfaitement conscients de cette réalité et ce serait d’ailleurs, la raison qui aurait motivé le ministre de la justice à initier un projet de Loi qui ferait sauter le verrou de l’immunité parlementaire pour les députés qui auraient maille à partir avec le pôle économique et financier dans le cadre de la lutte contre la corruption.

Les citoyens souhaitent de tout cœur que ce projet de Loi aboutisse car à leur entendement, une justice égalitaire et immunité parlementaire ne font pas bon ménage. Nous savons déjà que certains acteurs politiques de renom du pays, qui ont maille à partir avec la justice ou avec le Bureau du Vérificateur Général (BVG), se sont portés candidats aux prochaines législatives avec l’espoir d’y être élus et ainsi se soustraire de l’engrenage de la machine répressive contre la corruption.

 

El Hadj Mamadou GABA

By |2020-03-30T19:49:13+02:00mars 30th, 2020|A LA UNE, ACTUALITE, ECONOMIE|0 Comments

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