De 2013 à nos jours, Mohamed Al-Hassan est le deuxième djihadiste malien à passer devant la Cour Pénale Internationale (CPI). En effet, cette juridiction internationale a ouvert ce mardi 14 juillet 2020, le procès de Mohamed Al-Hassan de son vrai nom Mohamed Al-Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud. Ce djihadiste présumé est poursuivi pour des actes constitutifs de crimes contre l’humanité et crimes de guerre, commis lors de l’occupation de Tombouctou, par des groupes djihadistes en 2012. Il était le commissaire principal de la police des mœurs dans la cité des 33 saints et sa région.
Devant les juges de la CPI, cet ancien pharmacien vétérinaire membre d’un mouvement prônant la cause du peuple touareg, doit répondre d’un acte d’accusation terrifiant. En effet, il comparait pour répondre de treize (13) chefs d’accusation au nombre desquels on retiendra : torture, mariages forcés, esclavages sexuels, viols, persécutions, atteinte à la dignité de la personne, attaque contre des monuments religieux, etc. Pour l’accusation, Mohamed Al-Hassan était l’âme pensante et agissante de la police islamique et qu’à cet effet il avait un rôle clé pour mettre en coupe réglée la ville de Tombouctou, tyrannisée au quotidien pendant dix mois. Pour mieux étayer l’accusation, la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, signifiera aux juges que Mohamed Al-Hassan menait, lui-même, les patrouilles chargées de surveiller la population et de faire respecter les règles de la loi islamique, la ‘’Charia’’.
Il aurait aussi participé à l’application des décisions du tribunal islamique, infligeant des coups de fouets et d’autres châtiments violents aux personnes condamnées.
En plus la procureure affirme également que l’accusé a régulièrement pris part au système de mariages forcés entre des combattants djihadistes et des femmes de Tombouctou, sans le consentement de ces dernières. Toute chose qui a conduit à de nombreux viols. Dans son réquisitoire, la procureure générale près la CPI a soutenu qu’« Aujourd’hui (Ndlr : mardi 14 juillet 2020) commence le procès tant attendu de crimes inimaginables qui ont été commis au Mali. Tombouctou a vécu presqu’un an, dans la violence physique et morale infligée par les groupes armés. Dès qu’ils ont pris la ville, les membres d’AnçarDine et d’AQMI ont créé des organes de contrôle et de répression. Ils ont notamment créé le tribunal islamique et la police islamique dont Mohamed Al-Hassan, ci-présent, a été le commissaire incontournable. Ce faisant les membres de ce groupe ont exercé une emprise implacable sur Tombouctou. Leur plan était d’assujettir les tombouctiens et tombouctiennes à leurs contrôle et pouvoir ».
Comme il sied dans tout bon procès, après le réquisitoire, la défense est intervenue pour demander aux juges un examen médical pour s’assurer de l’état de santé de son client, l’accusé. Pour fondement de cette requête de la défense, l’une des avocates de Mohamed Al-Hassan voulu mettre en doute la capacité de l’accusé à comprendre les charges qui pèsent contre lui et donc à préparer sa défense. Car un rapport d’un expert médical indique que ce dernier souffre de troubles de dissociation et de stress post-traumatique.
Ne faudrait-il pas voir en cette requête, une simple stratégie de défense ?
Quoi qu’il en soit, la requête en question a été purement et simplement rejetée pour motif, les juges ont estimé que la requête en question est bien trop tardive. Néanmoins, les juges ont rassuré que les deux parties (accusation et défense) auront l’occasion de proposer, avant le 24 juillet 2020, des noms d’experts pour effectuer un examen médical de l’accusé. Le président de la chambre a ensuite demandé à Mohamed Al-Hassan s’il comprenait réellement tous les chefs d’accusation, au nombre de 13, retenus contre lui et s’il souhaitait plaider ‘’coupable’’ ou plutôt‘’ non coupable’’ pour chacun d’entre eux.
Si au niveau de la Cour Pénale Internationale (CPI) à la Haye ce procès revêt une grande importance, il faut dire qu’au Mali l’opinion publique y voit plutôt un non-évènement. Cette indifférence généralisée tient du fait que, pour la majorité écrasante des Maliens, l’accusé Mohamed Al-Hassan n’a servi que de faire-valoir dans les exactions et autres violations des droits humains durant l’occupation du septentrion malien par les groupes djihadistes. Les Maliens sont unanimes à reconnaitre que d’aucuns, parmi ceux qui étaient les vrais donneurs d’ordres à l’époque, continuent toujours de se pavaner impunément entre Bamako et Kidal. La communauté internationale et la Cour Pénale Internationale (CPI) le savent pertinemment, mais préfèrent fermer les yeux sur ce que l’on pourrait qualifier d’injustice pure et simple au nom d’une hypothétique paix.
El Hadj Mamadou GABA
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