Depuis bientôt trois semaines que le Mali est dans l’œil du cyclone, du fait d’un mouvement de contestation contre le régime en place, ses partenaires et amis se mobilisent pour une sortie idoine de cette impasse politique. C’est dans ce cadre qu’une mission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait séjourné à Bamako les 18 et 19 juin 2020 afin, non seulement de rencontrer et discuter avec les différents protagonistes de la crise sociopolitique que traverse le pays, mais aussi pour faire des propositions de sortie de crise.
En effet à l’issue de sa mission, la délégation de l’organisation sous régionale avait estimé que c’était plutôt les résultats proclamés par la Cour Constitutionnelle à l’issue des dernières législatives et vivement contestés par les population qui avaient été l’élément déclencheur de cette crise. A cet effet, les émissaires de la CEDEAO auraient proposé aux membres de cette institution judiciaire d’ordonner la reprise des élections législatives dans des localités où les résultats font objet de contestations. Bien que ce soit là un des grands points d’achoppement, le ‘’Mouvement du 5 juin- Rassemblement des Forces Patriotique’’ (M5-RFP) ne s’est pas accommodé de cette proposition des médiateurs. En conséquence, il a persisté à exiger la démission, pure et simple, du Président Ibrahim Boubacar KEITA. « Nous avons salué, bien-sûr, cette mission de bons offices de la CEDEAO mais nous sommes au regret de constater quand même que la CEDEAO a occulté l’ensemble des maux qui lui ont pourtant été exposés » avait déploré un des porte-parole du M5-RFP.
On devrait tout simplement comprendre par-là que, malgré la médiation de la CEDEAO, le ver est toujours resté dans le fruit en ce sens que les contestataires font toujours état de leur insatisfaction quant à leurs revendications concernant essentiellement la démission du Président de la République ou alors, dans une moindre mesure, la dissolution de l’Assemblée Nationale et le réaménagement de la Cour Constitutionnelle. Comme pour prendre le relais des médiateurs de la CEDEAO, l’arrivée à Bamako de trois Chefs d’Etat de la sous-région avait été annoncée avant d’être reportée. Qu’à cela ne tienne, les missions de bons offices n’arrêtent pas de multiplier les entrevues avec les différents protagonistes de la crise. Ainsi, le mercredi 24 juin 2020, le ‘’Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques’’ (M5-RFP) a rencontré des acteurs internationaux, des représentants de la Mission des Nations Unies au Mali (MINUSMA), de l’Union Européenne (UE), de l’Union Africaine (UA) et de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avec toujours la même question : comment tirer le pays de l’impasse politique ?
Le moins que l’on puisse dire est que cet entretien s’est déroulé dans un climat apaisé empreint de respect mutuel. Les membres du M5-RFP, qui, auparavant ne juraient que par la démission du Président de la République, ont mis balle à terre. Ils ont accepté un dialogue franc et constructif. Au sortir de cette rencontre et comme pour s’inscrire dans une logique d’apaisement de la situation, Nouhoun SARR, président du parti ‘’Front Africain pour le Développement’’ (FAD) et membre du M5-RFP dira « Nous avons échangé surtout sur leurs propositions de sortie de crise que nous avions rejetées en son temps, parce que nous n’avions pas compris la démarche. Vous savez le Mali est un pays de dialogue. Nous sommes un peuple de dialogue. Mais il s’agira de poser les vraies bases de discussion… ».
On pourrait peut-être se faire à l’idée que par cette modération de langage et de position du M5-RFP, certaines bases de négociation, telle que l’exigence de la démission du Président de la République, pourraient être reconsidérées par les protestataires. Au cours de la rencontre, ces derniers ont signifié à leurs interlocuteurs de la communauté internationale, qu’ils veulent surtout et avant tout un cadre clair de discussion pour faire, non pas des ‘’réformettes’’, mais plutôt des vraies réformes dans le pays. Il faut dire que cette mission de la communauté internationale ne s’arrêtera pas qu’à cette seule rencontre avec le M5-RFP. D’autres pourparlers devraient avoir lieu jeudi et jours suivants avec, outre la classe politique, des dignitaires religieux, des leaders d’opinion, des hauts fonctionnaires et des membres de la société civile afin de contribuer à l’apaisement du climat sociopolitique.
El Hadj Mamadou GABA
Avec Rfi
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