//PROPOSITIONS DE SORTIE DE CRISE DU M5-RFP: Les prémices d’un coup d’état constitutionnel

PROPOSITIONS DE SORTIE DE CRISE DU M5-RFP: Les prémices d’un coup d’état constitutionnel

Après moult négociations avec des organisations sociopolitiques nationales, sous régionales et internationales, le ‘’Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques’’ (M5-RFP) est finalement sorti du bois en étalant au grand jour ses réelles intentions. En effet, suite à plusieurs rencontres à l’interne, parfois jusqu’à des heures tardives de la nuit, ce mouvement contestataire du régime IBK s’est fendu d’un mémorandum pour faire ses propositions de sortie de crise et dans lequel il exige la mise en place d’une période transitoire dans les conditions ci-après :

  • 1- La dissolution immédiate de l’Assemblée nationale ;
  • 2- La mise en place d’un organe législatif de transition ;
  • 3- Le renouvellement intégral des membres de la Cour constitutionnelle ;
    4- La mise en place d’un gouvernement de Transition, avec les caractéristiques ci-après :
    a)- Le Premier ministre est désigné par le M5-RFP ;
    b)- Il ne peut être demis par le président de la République que dans les conditions prévue par la Charte de transition ;
    c)- Il forme son Gouvernement en entier ;
    d)- Il nomme aux hautes fonctions nationales (Administration, Justice, Forces armées et de sécurité, …) ;
  • 5- L’adoption d’une Feuille de route de refondation de l’Etat et de sauvegarde de la démocratie, de l’unité nationale, de la paix et de la cohésion sociale, assortie d’un chronogramme précis, à l’issue de concertations nationales ouvertes à toutes les forces vives de la Nation ;
    6- Le respect des textes relatifs au droit et à la liberté syndicale, à la justice sociale et aux engagements entre les parties ;
    7- L’adoption d’un pacte pour la stabilité sociale, la sécurité, la croissance et le développement ;
    8- L’adoption d’un mécanisme de suivi-évaluation annuel ;
    9- Le détachement des services exécutifs de l’Etat de la présidence de la République.
  • 10- Un accord politique sur l’ensemble de ces points sera dûment signé avec de solides garanties de sa mise en œuvre jusqu’à la fin du mandat en cours ;                                                                                 
  • 11- Une Charte de transition précisera et formalisera les termes convenus dans l’accord politique pour concilier les dispositions constitutionnelles actuelles avec les organes pertinents de la Transition.

Le M5-RFP exige également la libération du Chef de file de l’opposition, l’Honorable Soumaïla CISSE, victime d’enlèvement depuis plusieurs mois.

Au regard des termes de ce mémorandum, on ne peut s’empêcher de conclure qu’il ne s’agit là, ni plus ni moins, que des prémices d’un coup d’Etat constitutionnel. Bien que l’exigence de la démission du Président de la République ne soit pas mentionnée dans ce mémorandum, il n’en demeure pas moins que cette alternative reste toujours suspendue comme une épée de Damoclès.

En effet, les responsables du M5-RFP font de l’acceptation, par le Président IBK, des termes de leur mémorandum une condition sine qua non de l’abandon de leur exigence de la démission du Chef de l’Etat. Or à bien scruter les propositions contenues dans le mémorandum du M5-RFP, on se rend aisément compte qu’elles spolient le Président de la République de l’essentiel des prérogatives que lui confère la Constitution de la République du Mali. A titre d’exemples, la Loi Fondamentale du Mali dispose, respectivement, en ses articles 38 et 46 alinéa 2 que « Le Président de la République nomme le Premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur présentation par celui-ci de la démission du gouvernement. Sur proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du gouvernement et met fin à leurs fonctions (art. 38). Il (Ndlr : le Président de la République) nomme aux emplois civils et militaires supérieurs déterminés par la loi (art. 46 alin. 2) ».

Il apparait donc que, conformément à l’article 38 de la Constitution, la nomination du Premier ministre tient du pouvoir discrétionnaire du Président de la République. Aussi, en vertu de son article 46 alinéa 2, la Constitution confère au seul Président de la République le pouvoir de la nomination à des fonctions supérieures de l’Etat. Contrairement à ces dispositions constitutionnelles, les responsables du M5-RFP exigent que ce soit eux qui imposent, au Président de la République, un Premier ministre de leur choix et en plus, c’est à ce dernier que revient le pouvoir de nommer aux hautes fonctions de l’Etat.

Est-il besoin de dire que ces propositions du M5-RFP vont totalement à l’encontre des dispositions constitutionnelles du pays. Et pourtant à les entendre, ils affirment vouloir poser leurs actes dans le respect des dispositions constitutionnelles. Là où le bât blesse et qui pourrait être très dommageable pour le pays, est que même si les responsables du M5-RFP parvenaient à obliger le Président IBK à se plier à leurs desideratas en signant le mémorandum, ce qui n’est d’ailleurs pas évident, ils seront heurtés au refus d’autres institutions de la République et services rattachés de se soumettre à leur diktat en ne jurant que par la légalité constitutionnelle. Ce qui enlèverait toute légitimité et toute légalité au pouvoir qu’ils ambitionnent mettre en place. Encore pire, ces institutions qui refuseront de les suivre bénéficieront à coup sûr du soutien de tous les anti-M5 et Dieu sait qu’ils sont nombreux, eux-aussi. Toute chose qui pourrait conduire inévitablement à d’autres troubles qui dépasseraient les compétences du mouvement du 5 juin.

El Hadj Mamadou GABA

By |2020-07-03T16:11:16+02:00juillet 3rd, 2020|POLITIQUE|0 Comments

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