//RESOLUTION DE LA CRISE NÉE DE LA MANIFESTATION DU 5 JUIN: UN VRAI DILEMME CORNÉLIEN POUR LE PRESIDENT IBK

RESOLUTION DE LA CRISE NÉE DE LA MANIFESTATION DU 5 JUIN: UN VRAI DILEMME CORNÉLIEN POUR LE PRESIDENT IBK

Ce serait une lapalissade que dire le Mali se trouve en ce moment dans une situation critique due à une espèce d’exaspération qu’éprouvent les masses laborieuses du pays, eu égard à une mauvaise gouvernance que l’on reproche aux tenants du pouvoir d’Etat. Si depuis quelques années maintenant, les différentes composantes de la société malienne n’ont cessé d’interpeler les gouvernants, mais sans résultats probants, il faut dire que la manifestation qui s’est déroulée le 5 juin 2020 à Bamako pourrait bien laisser des empreintes indélébiles, tant elle a ébranlé le sérail du pouvoir d’Etat, du sommet à la base.

En effet cette manifestation grandiose initiée par une coalition politico-religieuse placée sous l’égide du charismatique Imam Mahmoud DICKO avait pour objectif principal, selon ses initiateurs, de contraindre le Président de la République Ibrahim Boubacar Keïta à la démission. Ce qui pouvait, évidemment, causer un cataclysme au sein de la République. Mais fort heureusement, pourrait-on dire, le rassemblement tant redouté par les tenants du pouvoir d’Etat s’est tenu mais le cataclysme qui aurait pu s’en suivre n’a pas eu lieu dans la mesure où on n’est pas parvenu à contraindre le Président de la République à la démission. Mais cela n’est peut-être que partie remise en ce sens que les manifestants ont finalement consenti à mettre un bémol à l’objectif qu’ils avaient visé, à savoir contraindre le Président de la République à la démission.

Signalons que dans leur déclaration datée du 5 juin 2020, le regroupement initiateur de la manifestation et composé de la CMAS, du FSD et de l’EMK, devenu aujourd’hui ‘’M5-RFP’’ (Mouvement du 5 juin pour le Rassemblement des Forces Patriotiques), avait écrit : « Depuis son avènement, le régime d’IBK s’est illustré par la tenue d’élections injustes, opaques et inéquitables, enlevant ainsi toute crédibilité au processus électoral dans notre pays. L’élection n’est plus un instrument efficace de régulation du processus électoral et ne permet donc plus de réaliser le changement de gouvernance souhaité par le peuple… ».

Nul n’est dupe que par une telle déclaration, les manifestants voudraient imputer cette tare de la gouvernance, non seulement au Président IBK mais aussi à la Cour Constitutionnelle du Mali dont les rênes sont tenues par Manassa DANIOKO.

On se souvient qu’au sortir des dernières législatives, Moussa TIMBINE avait été déclaré perdant à l’issue du second tour, suivant les résultats provisoires proclamés par le ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation. Mais à la surprise générale et au grand désarroi des Maliens, la Cour Constitutionnelle dont les décisions ne sont susceptibles d’aucun recours a remis ce dernier en selle en le déclarant plutôt élu à l’issue de ce second tour. Cette décision de l’institution judiciaire avait été très fortement contestée à travers le pays et cela a largement contribué à discréditer la Cour Constitutionnelle auprès de l’opinion publique malienne.

De cause à effet, si la décision de cette Cour est jugée illégitime et illégale, il va s’en dire forcément que l’institution parlementaire qui a bénéficié de cette illégalité, soit elle aussi dissoute, puisque illégitime. Les manifestants sont alors dans leur plein droit en exigeant du Chef de l’Etat la dissolution pure et simple de ces deux institutions, à savoir la Cour Constitutionnelle et l’Assemblée Nationale. Comme à l’accoutumée, devant une telle situation, la Communauté Internationale se fait toujours le droit d’intervenir auprès des protagonistes d’une crise d’envergure nationale. C’est dans ce  cadre qu’un groupe de médiation, constitué des représentants de l’ONU, de l’UA, de la CEDEAO et de l’UE, a été mis en place pour mener des négociations en vue de la résolution de la crise née de la manifestation du 5 juin 2020.

A l’effet de leur mission, les médiateurs ont été reçus en audience, le 6 juin 2020, par le Président de la République avant de rencontrer, le lendemain, 7 juin 2020, une délégation du M5-RFP conduite par Mahmoud DICKO.

Au cours de chacune de ces deux rencontres, les entretiens ont essentiellement porté sur une proposition de dissolution de l’Assemblée Nationale et de la Cour Constitutionnelle. Ce qui impliquerait, en toute logique, l’organisation de nouvelles élections législatives.

Comme pour faire preuve de sa bonne foi à aider les Maliens à résoudre cette crise, la communauté internationale se serait engagée à prendre en charge le financement de nouvelles élections législatives dans une transparence totale. Il serait superfétatoire que dire cette intervention de la communauté internationale, de par sa proposition de sortie de crise, constitue tout simplement un vrai dilemme cornélien pour le Président IBK en ce sens que ce dernier se trouve devant l’obligation de choisir entre deux possibilités comportant toutes deux des inconvénients. Soit qu’il accepte de dissoudre la Cour Constitutionnelle et l’Assemblée Nationale, conformément aux exigences des manifestants et même des médiateurs. Cela fragiliserait, outre mesure, son pouvoir dont le piédestal est constitué par ses deux institutions. Soit alors qu’il refuse de dissoudre ces deux institutions et en ce cas, il pourrait à tout moment essuyer la colère du peuple. Si les manifestants du 5 juin 2020 ont finalement consenti à mettre un bémol à leur revendication, il faut dire que ce bémol a plutôt consisté à lancer un ultimatum en direction du Chef de l’Etat. « Cette mobilisation n’est qu’un début contre le régime IBK. Et elle va continuer. Je jure que si ce rassemblement ne lui sert pas de leçon, l’histoire racontera la manière dont son pouvoir prendra fin… » avait prévenu l’Imam Mahmoud DICKO.

El Hadj Mamadou GABA

By |2020-06-10T16:37:10+02:00juin 10th, 2020|INTERNATIONAL|0 Comments

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